Chapitre 6 : Le norvégien dîtes-vous ?

« A chaque pays sa langue ! » … pas tout à fait ! À la Norvège on associe le norvégien, mais en réalité, cette langue n’existe pas vraiment ! Le passé compliqué de la Norvège a donné une langue un peu « partagée ». A mi-chemin entre le suédois, le danois, l’islandais. Mais ça dépend de quel « norvégien » on parle ! Le nynorsk ou le bokmål ?

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Carte de répartition du nynorsk et du bokmål en Norvège. En bleu le nynorsk en rouge le bokmål, les communes en grises parlent soit les deux langues soit un autre dialecte ou une autre langue.
Source : Wikipédia

Le bokmål (prononcer boukmôl) est la langue qui provient tout droit du danois ! Les locuteurs bokmål parviennent à se faire comprendre au Danemark (avec quelques difficultés tout de même et un accent très différent). Cette langue est l’héritière du Riksmål (la langue du royaume), aussi l’ancêtre du danois moderne. Il ne faut pas oublier que la Norvège a longtemps été sous la domination danoise qui imposait sa langue dans tout son royaume.

Le nynorsk (prononcer Nûnorchk) est le « néo-norvégien ». Cette langue provient directement du vieil islandais. Elle est très présente dans la région des fjords de l’ouest, notamment à Bergen (deuxième ville du pays) et Stavanger (première ville économique). Auparavant appelée le Landsmål, elle a énormément de points communs avec l’Islandais et seulement quelques-un avec le Bokmål. Les deux viennent à l’origine du norrois. Ces langues étaient les même autour de l’an 1000. L’une a pris le chemin du Danemark et l’autre de l’Islande, les deux se sont retrouvées en Norvège ! Le hasard fait bien les choses !

A titre d’exemple, le nynorsk contient trois genre grammaticaux le masculin, le féminin et le neutre alors que le bokmål n’en possédait que deux le masculin et le neutre. À la grande reforme de 1905 après l’indépendance norvégienne un an plus tôt. La Norvège voulait s’éloigner du danois et se rapprocher du nynorsk pour créer une seule et même langue, malheureusement ça n’a pas marché ! Pour s’aligner au nynorsk, le bokmål actuel a admis des mots féminins qui s’utilisaient auparavant au masculin, vous suivez toujours ? Aujourd’hui, en bokmål les deux formes sont autorisées. Je peux aussi bien dire « un femme », que « une femme » ou « ma mère que « mon mère », alors qu’en nynorsk uniquement l’utilisation de féminin sera correcte !

En plus d’avoir deux langues officielles, il existe une autre langues dérivée du nynorsk, le høgnorsk (prononcez heugnorchk), sans compter les dialectes de chaque région dans chaque comté, ajoutez à ça les langues et dialectes samis de Laponie. Je crois qu’on a jamais fini d’apprendre le norvégien !…

…Et pourtant il faut bien commencer ! Tout nouvel arrivant en Norvège à la possibilité de se rendre en école afin d’apprendre le norvégien. Ces écoles, appelées « VOKSEN OPPLÆRING » sont très présentes même dans les petites municipalités. La plupart des immigrés sont des réfugiés politiques venant essentiellement de Somalie d’Érythrée, d’Ethiopie ou d’Afghanistan. Ceux-ci sont encouragés par l’état norvégien à apprendre la langue, les cours leur sont accessibles à titre gracieux. Pour ma part étant ressortissant européen et travailleur immigré je bénéficie des cours car je le souhaite mais ma famille doit payer pour que je puisse accéder à l’enseignement du « GRAN OG LUNNER VOKSENOPPLÆRING ».

C’est donc le 15 septembre que j’ai débuté les cours et que j’ai rencontré les autres élèves. Assis en cercle dans la salle, ils se sont tous présentés un par un. Il y avait tellement de nationalités qu’on se croyait dans l’hémicycle de l’ONU… en plus petit je l’accorde ! Je me suis assis entre la Thaïlandaise chaleureuse et le Turc blagueur juste devant le Brésilien qui dormait contre le radiateur et face à la Lithuanienne hystérique au rire insupportable ! Tous les matins de semaine j’assiste donc au cours de Rita, une quinquagénaire norvégienne énergique entamant sa première année d’enseignement à des étrangers. Parfois pensant parler à des norvégiens elle s’emballe et part dans des explications compliquées en s’exprimant vite et dans un langage compliqué sans même se rendre compte qu’elle perd toute son audience ! Il faut régulièrement lui rappeler qu’on ne comprend pas.

Malgré tout, rencontrer ces gens qui sont presque tous adorables et échanger avec eux en écorchant à sa manière chacun son tour l’anglais ou les timides mots de norvégiens, c’est quelque chose d’unique !

« Qui apprend une nouvelle langue acquiert une nouvelle âme ! »
#Juan Ramon Jimenez
Carte de Norvège : Propriété de Wikipedia.

Lucas

Troll des montagnes à l'esprit vif et au regard aguerri.

Une pensée sur “Chapitre 6 : Le norvégien dîtes-vous ?

  • 6 décembre 2014 à 14 h 06 min
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    C’est du sérieux,
    mon neveu !
    De mon passage à Tromsø j’ai retenu une expression qui revenait assez fréquemment et qui se prononçait de différentes manières, suivant l’origine des personnes probablement, mais surtout en fonction de la hauteur du soleil au cour de la nuit : « skoll ! »
    Mon grand père disait :  » Y a des jours qu’on voit pas clair la nuit !  »
    C’est qu’il n’était jamais allé boire un canon chez le Bådøt de Tromsø…
    Bravo Lukås !

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    • 6 décembre 2014 à 14 h 55 min
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      Ha ! Alors là ! Le Bådøt de Tromsø on ne l’avait encore jamais faite celle là ! :)
      A tromsø ils parlent Bokmål mais il y a surement l’accent du Troms ou du Finnmark. Et ils doivent très certainement avoir des mots inspirés des langues samis, laponnes. Car les termes pour le soleil de minuit, le soleil qui qui ne se lève pas … c’est d’origine lapone, les mots ont été gardés !
      Après si tu parles de « Skål » ! Je vois que tu as pas mal trinqué la haut alors 😀

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      • 9 décembre 2014 à 23 h 16 min
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        Eh bien, comment dirais-je ? En voyage, je ne me départis jamais d’un point de vue ethnologique. Aussi mets-je beaucoup de soin à respecter les us et coutumes des pays sauvages que je traverse. Dans cette contrée lointaine – où l’on parle le Bokmål, comme tu dois le savoir, n’est-il pas ? – j’ai passé beaucoup de temps à apprendre ce nom de « Mack » avec les subtiles variantes des accents du Troms et les sonorités plus gutturales, quoique finement ciselées, des intonation du Finnmark.
        « Mack » ! que d’envolées lyriques sa mousse pétillante et onctueuse ne m’a-t-elle pas suscitées ! Combien de fois ai-je dû recommencer l’exercice au son rythmé des « Skål » sonores dont tu me rappelles l’orthographe ainsi que la profonde vibration au fond de mes oreilles et la douleur irrépressible qui tenaillait mon épaule à chaque fois qu’elle était éclatée par une main – amicale, certes, mais excessivement rude – de mon voisin de table, pêcheur des mers arctiques, plus habitué à casser la glace pour libérer son bateau qu’à faire de la broderie en attendant le dégel…
        J’attendais toujours que pointe le petit jour pour aller me coucher. Finalement j’ai quitté Tromsø avant la nuit.
        Je n’ai jamais réussi à prononcer correctement ni « Mack » ni « Skål », les exercices répétés se perdaient dans une articulation vite devenue pâteuse et tout était à recommencer à la séance suivante.
        Très, très dure la vie d’aventurier. Oui, très dure…

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    • 10 décembre 2014 à 14 h 47 min
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      Mais quelle aventure de boire une bière dans le Troms ! Des fois on galère quand on est aventurier, on imagine pas ! Moi c’est vite réglé … je ne bois pas de bière ! Difficile à imaginer quand on vit en Norvège !

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      • 11 décembre 2014 à 19 h 23 min
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        En Norvège…
        sans boire de bière…
        N’importe quoi pour se faire remarquer !
        Tu manges de la baleine, au moins ?

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