Chapitre 17 : Le 17 mai !

FullSizeRender 2Vous n’imaginez même pas à quel point le 17 mai est important pour un norvégien. La fête nationale, l’anniversaire de la signature de la constitution du pays est vraiment très célébrée par la population qui est très patriotique et très fière de son pays. Cher Français, honnêtement qui a déjà mis des drapeaux à ses fenêtres pour un 14 juillet, à part des feux d’artifices ou des pétards dans le jardin, notre fête nationale, nous, on s’en fiche quand même pas mal !

Commençons par une courte page d’histoire : le 17 mai 1814, la Norvège signe sa constitution mettant fin à l’appartenance danoise du pays. L’événement se passe à Eidsvoll, (à mi-chemin entre Oslo et Lillehammer, où aujourd’hui se situe un lieu historique retraçant les faits). Le 17 mai n’étant pas encore une fête à échelle nationale, des petites fêtes privées s’organisaient, principalement à Trondheim. Ce n’est qu’à partir de 1827 qu’on a commencé à la fêter à Oslo, (Christiania, à l’époque) mais après la mort du roi suédois Carl Johan, en 1844, la fête s’est célébrée beaucoup plus librement car ce dernier voyait cette fête comme une provocation politique à l’égard de son pays (bien que n’étant plus rattachée au Danemark, n’oublions pas que la Norvège était sous domination suédoise).

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Un drapeau pour chaque maison …

Le 17 mai, appelé en norvégien, le Grunnlovsdagen (le jour de la constitution), fait parti des fêtes auxquelles les norvégiens sont très attachés. Noël, Pâques et le 17 mai sont vraiment trois moments très importants dans l’année. Les publicités à la télé, ou des prospectus dans la boîte à lettre rappellent qu’ils faut acheter des drapeaux, des bougies aux couleurs de la Norvège, des petites serviettes de table pour le repas, et bien-sûr, le bunnad ! Chaque norvègien est prêt à dépenser des milliers de couronnes pour ce jour. Le bunnad est un costume traditionnel plutôt élégant, certes, mais qui coûte une petite fortune, surtout pour habiller des enfants qui deux ans plus tard ne pourront plus le porter du fait de leur croissance. Mais, de crainte, si bunnad il n’y a pas, costard il y a !

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Vimpel

Il est coutume en Norvège d’afficher un drapeau dans son jardin, surtout en milieu rural ou il y a place dans le jardin pour dresser un mât. Tout au long de l’année, la plupart des norvégiens dressent un « vimpel » un long fanion qui prend les couleurs de la norvège sans montrer la croix (ce qui fait, blague à part, le drapeau de la Thaïlande). Pour les jours plus importants, le vimpel est remplacé par le vrai drapeau, le rectangle de plusieurs mètres de long. Je peux vous assurer que dans les villages, quand presque chaque maison à sorti le sien, c’est plutôt impressionnant et étonnant pour un français comme moi qui, dans son pays, ne voit pas tant de drapeaux aux abords des maisons.

FullSizeRender 6Cette année, le 17 mai tombait un dimanche, en France j’en connais plus d’un (moi le premier) qui aurait dit « un jour férié qui tombe un dimanche, ça sert à rien », peut-être que certains norvégiens, l’ont également pensé mais qu’à cela ne tienne, ils sont là, tambours battants pour fêter leur 17. mai (syttende mai, en norvégien).

Les parents qui ont des enfants scolarisés ou inscrits en garderies (barnehage) doivent être présents lors du défilé ou plutôt du « tog » (en norvègien, pour défiler, on utilise le même mot que le train). « -On prend le train de l’église à l’école ? Mais il n’y a pas de ligne là-bas ! » Ma naiveté m’étonnera toujours… Nous nous sommes donc réunis devant l’église, où chaque parent et enfant bien vêtus, avait apporté son petit drapeau et … le ciré, ou plutôt l’anorak car en ce 17 mai, il neigeait et faisait 2°, mais il en faut plus pour arrêter un norvégien ! Tout le monde se saluait en se souhaitant « Gratulerer med dagen » (Félicitations pour ce jour), une phrase qui est utilisée pour souhaiter un joyeux anniversaire. Pensant que beaucoup avaient leur anniversaire ce jour-là, on m’a finalement expliqué que c’était l’anniversaire de la Norvège.

FullSizeRender 3Depuis l’église nous devions marcher (le fameux « tog« ) jusqu’à l’école. Pensant faire un super reportage photo, les gens habillés en bunnad avaient revêtu leur anorak classique, chaque citoyen tenant un drapeau avait en plus un parapluie (généralement noir) ce qui donnait un aspect très triste au cortège et des photos ratées bien entendu !

Grâce aux parapluies et aux rafales de vent, nous sommes arrivés plus vite que prévu. Manquant de m’envoler, à cause du mien, j’ai lâché un « oh j’aime la Norvège » ce qui a bien détendu l’atmosphère. « Le français n’a pas trop froid », « non, non le français est habitué maintenant » répondais-je !

Devant l’école nous avons tous chanté l’hymne national que j’avais appris la veille pour éviter de passer pour un idiot, dans ce pays tellement patriotique. « Ja, vi elsker dette landet som det stiger frem…. » (« Oui, nous aimons ce pays qui emerge… »). Une bonne marseillaise aurait tout à fait convenu !

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Magasins Légo à Jessheim (Akershus) aux couleurs de la Norvège

Il est commun de rester à l’école pour faire des petits jeux, manger des saucisses (pølse), des sandwichs (rundstykker) et puis boire un coup, disons-le ! Mais le temps était tellement peu clément, la neige qui se transformait en pluie ne nous laissait pas au sec, même avec un parapluie. Nous avons donc décidé de rentrer et de manger à la maison, tout aussi bien. Nous nous sommes régalé du gâteau traditionnel, le Kransekake. Fait à base de blancs d’œufs et d’amandes c’est un gateau en « tour », assemblé de cercles du plus grand au plus petit.

Autour de cette date et surtout avant, la Norvège voit débarquer les russ. Rien à voir avec les soviétiques, le russ est un peu comme le percent des bacheliers en France. Il s’agit d’une fête avant l’examen de fin d’année pour les étudiants complétant le videregående, (fin de 12 ans d’études). Les russ portent des pantalons ou salopettes de couleur rouge (ou bien bleu ou noir). Ils passent un passage initiatique le 1er mai et font comme un carnaval le jour de la fête nationale, entre temps ils font la fête, beaucoup la fête, trop … chaque année il y a beaucoup d’abus, d’excès et d’accidents. Ils se réunissent en petit groupe pour acheter (souvent) un bus, ou un van qu’ils décorent aux couleurs de la Norvège ou plus simplement de rouge. Le mieux est qu’ils réussissent à obtenir des sponsors pour les aider à payer.
La Norvège ferme un peu les yeux sur ces russ, la plupart de citoyens sont fiers d’eux pour l’aspect « je suis allé au videregående (non obligatoire) et j’ai fini mes études » (mais n’oublions pas qu’ils font la fête avant d’avoir passé leurs examens). À coté de ça, les russ viennent visiter les jeunes enfants pour leur distribuer des cartes (de visites). Une photo est affichée (parfois à la limite de l’acceptable), une adresse un téléphone, et une citation (qui peuvent être d’un goût particulier).

IMG_8922Des anciens étudiants, (« des vieux russ » ça sonne bizarre) m’ont confié qu’avant la photo pouvait être loufoque mais correcte et la citation était en fonction des centres d’intérêt. Cherchant plus d’information à propos de cette fête que je ne connaissais pas du tout j’ai trouvé cette phrase sur wikipédia : « La Norvège […] préfère généralement jeter un voile pudique sur leur comportement bruyant et outrancier »

J’ai donc eu mon premier 17 mai norvégien sous la neige et puis bien au chaud à la maison, à regarder, à la télé, le roi faire coucou depuis le balcon du palais royal et des envoyés spéciaux dans les autres villes, comme à Tromsø, tout au nord de la Norvège, où le soleil brillait radieusement. La chance n’est pas partout !

Pourrait-on imaginer un tel engouement pour la fête nationale française ? La nôtre tombe en plein milieu de l’été où une bonne partie des français sont en vacances. Qu’il y ait un jour férié ou pas, ça ne change pas grand chose à part que le Franprix du quartier ferme à 11h30. Pour ce qui est des drapeaux, en France, c’est quand même assez mal vu d’avoir un drapeau sur mât dans son jardin, ici, il serait plutôt mal vu de ne pas en avoir !

« Les mots manquent aux émotions ! »
#Victor Hugo

Lucas

Troll des montagnes à l'esprit vif et au regard aguerri.

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