Chapitre 22 : Ça se renouvelle !

Après avoir rassemblé tous mes papiers et vérifié que mon nouveau contrat de travail était bien signé, je devais voir avec l’immigration norvégienne quelle était la procédure à suivre. Mon précédant contrat étant déterminé à 1 an, je me demandais quel était le moyen de préciser que je resterais quelques mois de plus ici. Habitué à une immigration de masse, la Norvège possède un service bien rodé sur internet qui s’appelle UDI (Utlendingsdirektoratet, bureau de l’immigration, rien à voir avec le parti politique centriste). Dans la catégorie « Au pair » je clique sur « renouvellement » et obtiens une liste de tout ce que j’ai à faire. Super simple ou presque …

Contrat signé, c’est fait. Pièce d’identité, j’ai. Il ne reste plus qu’à remplir une fiche de renouvellement et de prendre un rendez-vous auprès du poste de police du district pour pouvoir obtenir l’autorisation de rester quelques temps encore.

Mon contrat démarrait le 1er septembre. L’année dernière également et je me souviens m’être présenté le jour-même au poste de police de Gran (à 10 km de mon lieu de résidence). En quelques minutes, c’était fait, j’avais mon papier. Le 25 août de cette année, je me connecte sur UDI afin de remplir ma fiche. J’avais fait la même démarche l’année dernière depuis la France et j’avais été étonné de la simplicité. À la fin du formulaire, grâce à mon code postal, le site doit me donner le poste de police le plus proche pour m’enregistrer, en l’occurence Gran.

« Votre inscription est enregistrée, veuillez prendre un rendez-vous au poste de police de Gjøvik ». Oups, il doit y avoir une erreur car Gjøvik n’est pas dans mon district. Certes, il s’agit d’une ville de mon comté qui joue le rôle de « sous-préfecture » pour éviter d’aller à Lillehammer pour les démarches importantes, mais pour ce qui est de la police, le poste le plus proche est à quelques kilomètres de chez moi, beaucoup plus accessible que Gjøvik à 70 km (avec une route peu agréable). J’abandonne l’inscription pour contacter le bureau de Gran et leur demander pourquoi il n’est pas possible de les choisir sur UDI. « Suite à un regroupement administratif le bureau d’administration est déplacé à Gjøvik » me répond-on. Un rendez-vous, m’a donc été assigné, le 18 septembre à 9h45.

Vendredi 18, pour joindre l’utile à l’agréable, ma famille m’a donné ma journée pour pouvoir aussi profiter de Gjøvik et ne pas seulement faire l’aller-retour. « Prends le train c’est quand même plus agréable, comme ça tu peux lire ». C’est vrai, bonne idée, j’ai un bouquin à finir. Dans le train, le contrôleur me signale que je devrai descendre à mi-parcours pour prendre un bus car la ligne est en travaux. Soit. À cause du transfert en bus je suis arrivé plus tard que prévu, pas très en forme, car lire dans un bus qui prend une route sinueuse, ça n’arrange rien mais je n’étais pas en retard pour autant.

9h30, je me présente au poste de police, vu l’impossibilité de choisir l’horaire de mon rendez-vous j’imaginais une queue monumentale. Nous étions trois. La secrétaire, un agent d’entretien et moi ! « Oui, tu as rendez-vous à 9h45, assieds-toi pour patienter, on viendra te chercher ».

9h45, une porte s’ouvre derrière et moi et mon nom est prononcé dans la salle. Elle aurait pu dire « suivant » la question ne se posait pas. Y avait-il un précédent, d’ailleurs ?

La dame se présente et me demande de la suivre dans son bureau. Là, je lui donne tous mes papiers, elle fait une photocopie de mon passeport, me demande ma dernière autorisation norvégienne de rester sur le territoire. Elle examine un instant apparemment très préoccupée. Mon regard s’était déjà enfui dehors où depuis la fenêtre on voyait l’immense lac Mjøsa.

– Pourquoi est-ce que tu viens en fait ?
J’avoue qu’il m’a fallu quelques secondes avant que mon esprit revienne à la situation présente et que je retourne sa question dans tous les sens.
– C’est plutôt à moi de vous le demander, car c’est vous qui vouliez me voir ! N’est-ce pas ?
La femme, amusée par mon humour me rendit un large sourire.
– Tu es citoyen français et donc citoyen européen. Dès l’instant où tu es venu ici, en Norvège, tu as obtenu ce papier, dit-elle en brandissant mon autorisation de séjour. Mais tu vois, ici c’est écrit « Validité : Illimitée ». Tu n’as pas besoin de renouveler ton titre de séjour, Dès l’instant où tu as un emploi de minimum 10h par semaine en Norvège, ce papier est valide.

Complètement perplexe et abattu par ce qu’elle venait de me dire je réalisais que j’étais venu pour rien. J’avais lu cette mention la veille au soir en préparent mes papiers et elle m’avait laissé suspicieux.
– Il fallait quand même que je vienne pour vous montrer mon nouveau contrat, non ? Avais-je annoncé, en essayant de trouver une raison pour ma venue.
– Même pas ! Tu es citoy…
– …citoyen européen, je sais … Mais comme ici ce n’est pas l’UE on peut se poser des questions.
– C’est vrai, mais c’est l’Espace Schengen. C’était un peu idiot de venir, annonça-t-elle avec un petit rictus.

En sortant du poste de police, il flottait comme vache qui pisse, je me suis réfugié dans un joli centre commercial ou j’ai bu un café et mangé une kanelbolle , errant de boutiques en boutiques pour faire passer le temps, j’étais la seule proie des commerçant qui s’ennuyaient comme des rats morts du fait de la fréquentation du vendredi matin. « Je peux vous aider ? » j’ai arrêté de compter cette question après 31.

Avec l’arrivée du soleil je me suis un peu promené près du lac et je suis retourné à la gare pour reprendre le train … euh le bus ! Cette fois-ci, le bus a roulé tout le long du voyage pour cause de travaux sur toute la ligne. Je suis arrivé à 14h, blanc comme un linge, l’estomac chahuté, mais content de rentrer.

Plus tard je reçois un message de ma famille « Ça s’est bien passé ? Avais-tu tous les bons papiers ? ».
– Mieux que ça, ai-je répondu, je n’avais pas besoin d’y aller !…

Néanmois, j’ai arpenté les rues de Gjøvik au charme si singulier, je serai donc en mesure de vous proposer une « Escale à Gjøvik » dans les mois à venir. Allons, pas de regrets !

« Le regret est une seconde erreur. »
#Raymond Latarjet

Lucas

Troll des montagnes à l'esprit vif et au regard aguerri.

2 pensées sur “Chapitre 22 : Ça se renouvelle !

  • 23 septembre 2015 à 20 h 23 min
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    Apprenti migrant va !…

    Sympa l’article.
    Salut

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  • 28 septembre 2015 à 16 h 27 min
    Permalink

    J’ai envie de te dire qu’il n’y a pas de hasard! Tu avais lu que la validité était illimitée, et tu n’as pas eu confiance….ce serait pas un retour d’ancestrale méfiance vosgienne ça? Prends confiance en toi!

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